Un départ définitif de Suisse ne se limite pas à un simple changement de résidence. Il implique des enjeux fiscaux complexes qui méritent une attention particulière. Pour préserver au mieux ses intérêts patrimoniaux, il est essentiel d’anticiper les conséquences de cette transition et de s’informer sur les options disponibles.
Lorsqu’une personne quitte définitivement la Suisse, elle peut, sous certaines conditions, retirer en espèces l’intégralité de son avoir de libre passage, comprenant à la fois la part obligatoire et la part sur-obligatoire. En cas de départ vers un pays situé hors de l’Union européenne ou de l’AELE, il est possible de retirer l’entier de l’avoir de libre-passage. En revanche, pour les personnes s’installant dans un État membre de l’UE ou de l’AELE, la législation suisse impose une restriction : seule la part sur-obligatoire peut être retirée, sauf à démontrer que l’on n’est plus assujetti à une assurance sociale obligatoire dans le pays d’accueil.
En cas de domicile à l’étranger, le prélèvement de l’impôt à la source est effectué par le canton dans lequel se trouve l’institution de prévoyance. Or, les taux d’imposition varient considérablement d’un canton à l’autre. Certains, comme celui de Schwytz, appliquent des taux particulièrement bas, ce qui peut représenter une opportunité d’optimisation fiscale. Cette stratégie peut s’avérer judicieuse, notamment pour les personnes qui s’installent dans un pays qui n’impose pas les retraits de capitaux suisses. Toutefois, elle perd de sa pertinence dans la majorité des cas, car de nombreux pays imposent également ces prestations en capital.
Lorsqu’une convention de double imposition (CDI) existe entre la Suisse et le pays de résidence, elle peut permettre de demander le remboursement de l’impôt à la source suisse, à condition de prouver sa résidence fiscale à l’étranger. Dans ce contexte, le choix du canton suisse devient secondaire, car l’imposition finale dépendra du régime fiscal du pays d’accueil.
La fiscalité applicable dans le pays de destination joue donc un rôle central. En France, par exemple, il est possible de bénéficier d’un taux d’imposition réduit à 6,75 % sur le capital de prévoyance suisse, à condition de respecter des critères stricts, notamment l’interdiction de procéder à des retraits partiels. Si ces conditions ne sont pas remplies, le capital est alors soumis à l’impôt sur le revenu, avec un taux pouvant atteindre jusqu’à 45 %. En Espagne, la situation est moins favorable : aucune fiscalité préférentielle n’est prévue, et le capital est imposé comme un revenu ordinaire, avec des taux progressifs pouvant aller jusqu’à 47 % (voire 50 % dans certaines régions autonomes).
Un autre facteur déterminant réside dans la nature de l’emploi exercé en Suisse. Si le capital provient d’un emploi public et que la personne concernée possède la nationalité suisse, la convention de double imposition peut attribuer le droit d’imposition exclusivement à la Suisse, même après le départ. Il est donc essentiel d’identifier avec précision le statut de l’activité exercée avant toute décision de retrait.
Une attention particulière doit également être portée aux rachats de cotisations de prévoyance professionnelle effectués peu avant un départ à l’étranger. Le Tribunal fédéral a récemment rappelé que de tels rachats peuvent être considérés comme une forme d’évasion fiscale. Dans une affaire récente, une contribuable résidente en Suisse depuis plusieurs années avait procédé à des rachats pour un montant de CHF 241'500, qu’elle avait ensuite transférés sur deux comptes de libre passage avant de quitter le pays. En l’absence de preuve d’un retour imminent en Suisse, les juges ont estimé que ces rachats étaient inadaptés à l’objectif de prévoyance. La déduction fiscale a donc été refusée.
Ainsi, la fiscalité applicable au capital de prévoyance dépend d’une combinaison de facteurs : le pays de destination, les conventions fiscales en vigueur, la nature de l’emploi exercé, les modalités de retrait choisies, et le canton de l’institution de prévoyance. Pour éviter les mauvaises surprises et prendre les bonnes décisions, il est vivement recommandé de se faire accompagner par des experts.
Les conseillers du service des solutions patrimoniales de la banque Piguet Galland & Cie SA sont à disposition pour analyser chaque situation personnelle, anticiper les conséquences fiscales d’un départ, et orienter vers les choix les plus avantageux pour l’avenir.