
La baisse de taux de la Réserve fédérale est à présent une certitude.
La détérioration du marché de l’emploi aux Etats-Unis s’est confirmée au mois d’août. On dénombre seulement 22'000 créations d’emploi durant le mois, alors que les économistes tablaient déjà sur une estimation faible de 75'000 postes. Toutefois, le taux de chômage reste inchangé à 4,3 %. Les marchés ont salué ces chiffres. En effet, la faiblesse observée est assez sérieuse pour pousser la Réserve fédérale (Fed) à assouplir sa politique monétaire, mais la publication n’est pas assez mauvaise pour réveiller les craintes d’une récession chez les investisseurs. Un scénario favorable pour les bourses américaines se dessine. Il est aujourd’hui certain que Jérôme Powell annonce une coupe des taux directeurs de la Fed la semaine prochaine, ouvrant ainsi la voie à un nouveau cycle d’assouplissement des conditions financières aux Etats-Unis. L’inflation passe ainsi au second plan…pour le moment !
Rallye de sentiment sur le marché chinois
Depuis deux mois, les actions chinoises ont enregistré un rebond remarquable, surperformant à la fois les indices régionaux et mondiaux. Les actions domestiques «A-Shares» ont surmonté le démarrage timide du début d’année, affichant désormais une progression de 14 % depuis le début de 2025. Pourtant, ce rallye boursier s’inscrit dans un contexte macroéconomique contrasté, marqué par un essoufflement de la dynamique conjoncturelle domestique.
Les données publiées pour le mois de juillet confirment un affaiblissement de l’activité économique : la production industrielle n’a progressé que de 5,7 % en glissement annuel, tandis que les ventes au détail ont ralenti à 3,7 % sur la même période. À notre sens, un rebond durable de la consommation ne pourra se concrétiser sans une reprise soutenue du secteur immobilier.
Jusqu’à présent, les exportations ont fait preuve d’une résilience notable, soutenues par des stratégies de transbordement visant à atténuer l’impact des droits de douane. Néanmoins, malgré une réorientation vers l’Asie du Sud-Est et l’Europe, les dernières données montrent un net ralentissement : la croissance des exportations est retombée à 4,4 %, son niveau le plus bas depuis six mois, et inférieur aux attentes du consensus.
Dans ce contexte de modération économique, la question des mesures de soutien monétaire et budgétaire redevient centrale. Alors qu’aux États-Unis, la dégradation de certains indicateurs – notamment l’emploi – pourrait ouvrir la voie à un assouplissement monétaire de la Fed dès septembre, Pékin maintient une approche graduelle et ciblée, évitant tout recours à un stimulus généralisé.
Dès lors, comment expliquer cette performance récente du marché chinois ? Les investisseurs ont favorablement accueilli l’accalmie des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine. Toutefois, la trêve tarifaire en vigueur jusqu’en novembre demeure fragile, et la menace d’un retour à des niveaux punitifs persiste. Cette amélioration du sentiment, tant domestique qu’international, a catalysé une reprise de la liquidité. Il convient également de rappeler que les valorisations initialement déprimées – le marché chinois ayant été encore jugé
« non investissable » en 2022 – ont favorisé un fort effet de base, révélant une mémoire de marché parfois courte.
À court terme, le marché boursier chinois semble légèrement en avance sur ses fondamentaux. Le mouvement haussier repose principalement sur l’abondance de liquidité, la normalisation du sentiment, et des flux de réallocation, plutôt que sur une amélioration structurelle des bénéfices des entreprises.
La poursuite de ce mouvement boursier dépendra désormais de deux facteurs : l’ampleur et la rapidité des mesures de relance que Pékin choisira de mettre en œuvre, ainsi que l’évolution du dossier commercial sino-américain, notamment les décisions attendues à Washington d’ici novembre. D’ici là, un potentiel de hausse subsiste si le moral des investisseurs continue de s’améliorer, bien que le risque de prises de profit en cas de surprise géopolitique reste non négligeable.
Chiffre de la semaine : 52
Aux Etats-Unis, l’indicateur ISM des Services est ressorti légèrement supérieur aux attentes la semaine passée et confortablement en zone d’expansion. La solidité de l’activité des services est un argument majeur qui nous permet d’écarter l’imminence d’une récession dans le pays.
Auteur
-
Ed Yau est un spécialiste des marchés asiatiques avec 20 ans d’expérience en gestion de portefeuilles d’actions. Auparavant, il a travaillé comme responsable de la recherche dans plusieurs Hedge Funds en Suisse et à Singapour. Ingénieur HES de formation, il est également titulaire d’une licence de l’Université de Genève et d’un MBA de l’Université de Chicago. Il rejoint la Banque en 2018 et devient membre du comité d’investissement, en charge de la gestion de plusieurs fonds actions et certificats thématiques, ainsi que de la mise en place d’investissements ESG.