Point sur les marchés - 28 juillet 2025

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Léonard Dorsaz Analyste-gérant de fonds

Stabilisation sans doute temporaire du dollar
Le dollar américain semble se stabiliser en juillet. Un rebond technique est même envisageable après la forte baisse enregistrée durant le premier semestre (recul de plus de 10 % face au franc suisse). Malgré cet éventuel sursaut temporaire, nous restons prudents. Les risques d’une dépréciation supplémentaire demeurent en effet importants. Le contexte fondamental continue d’indiquer une faiblesse du dollar, notamment en raison du creusement du déficit budgétaire, lié à la politique de l’administration Trump, caractérisée par des baisses d’impôts et une forte augmentation des dépenses, sans compensations fiscales équivalentes. Le déficit commercial, quant à lui, devrait continuer de se creuser malgré le relèvement en cours des droits de douane. Par ailleurs, le supplément de rendement offert par le dollar risque de s’amenuiser, alors que la Réserve fédérale américaine devrait recommencer à baisser ses taux directeurs dès cet automne. En parallèle, la stratégie industrielle de Washington semble favoriser implicitement une dépréciation du dollar. Dans leur volonté de réindustrialiser le pays, les autorités américaines considèrent un taux de change plus faible comme un levier pour restaurer la compétitivité des exportations.
Matières premières – Les métaux précieux brillent !
Le marché des matières premières a traversé deux séquences très différentes depuis le début de la décennie. Dans un premier temps, jusqu’à la mi-2022, le pétrole dominait nettement, porté par la reprise post-Covid, des stocks faibles et les tensions géopolitiques, notamment après l’invasion de l’Ukraine par la Russie. À l’époque, le baril avait dépassé les 120 dollars et les investisseurs redoutaient une crise énergétique mondiale. Pendant ce temps, l’or restait sans direction.
Depuis lors, les dynamiques se sont inversées. L’or affiche une performance impressionnante, soutenu par une demande persistante de la part des banques centrales. Il représente désormais la deuxième réserve mondiale derrière le dollar, dépassant l’euro. Et rien ne laisse penser que cet intérêt stratégique se tarira, comme le montre une étude récente sur les intentions d’achats des banquiers centraux. Dans un monde fragmenté, marqué par les tensions géopolitiques et l’incertitude monétaire, l’or retrouve un rôle central dans les allocations souveraines. De plus, ce mouvement semble récemment s’élargir aux autres métaux précieux, traduisant un retour d’intérêt des investisseurs depuis des niveaux très bas et une reprise de la demande industrielle. L’argent progresse ainsi et se rapproche des plus hauts atteints en 2011. Le platine se réveille après une décennie sans direction. Sans oublier le palladium, qui suscite à nouveau de l’intérêt après avoir été longtemps pénalisé par la faible demande pour les voitures à combustion.
Le pétrole, en revanche, subit une pression baissière. Malgré un contexte géopolitique instable au Moyen-Orient, les fondamentaux restent défavorables : l’OPEP continue d’augmenter sa production, ce qui permettra une normalisation des stocks. Cette dynamique devrait maintenir les prix dans une zone basse, entre 60 et 70 dollars le baril. Le manque d’investissements actuel et la diminution rapide des capacités de production excédentaire permettront une nouvelle phase haussière, mais nous pensons qu’il est trop tôt pour s’y intéresser.
Par ailleurs, l’évolution récente de la politique commerciale américaine, marquée par un usage accru des droits de douane, pourrait à terme rebattre les cartes au sein des matières premières. En cas de relocalisation industrielle ou de fragmentation durable des chaînes de valeur, certains métaux - comme le cuivre - pourraient gagner en importance stratégique. Ce changement de leadership sectoriel reste un scénario plausible, mais prématuré : pour l’heure, les signaux restent trop faibles pour en faire notre hypothèse centrale.
Chiffre de la semaine : 15 %
C’est le niveau auquel les produits européens qui entrent aux Etats-Unis vont désormais être taxés. Les bourses européennes célèbrent cette annonce qui réduit les incertitudes en lien avec les tensions commerciales.





Intervention de Daniel Varela dans Le Temps
Dépréciation du dollar : entre diversification globale et opportunité stratégique pour les États-Unis
Auteur
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Diplômé de l'Université de Genève en mathématiques, Léonard Dorsaz a rejoint le domaine bancaire et s'est spécialisé dans la sélection de fonds, plus particulièrement les fonds alternatifs. Il a rejoint Piguet Galland en 2004, où il chapeaute le département en charge de la sélection et du suivi de produits externes et gère depuis 2008 le Piguet Opportunity Fund. Il est titulaire du diplôme CIIA.