Point sur les marchés - 23 juin 2025

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Christina Carlsten Analyste-gérante de fonds

Taux de la BNS au plancher, vraiment ?
Comme anticipé, la Banque nationale suisse (BNS) a abaissé son taux directeur de 0,25 point de pourcentage, le ramenant à 0 %. Cette décision s’inscrit dans le sillage d’un assouplissement monétaire mondial, alors que l’inflation helvétique a fortement ralenti ces derniers mois. Dans un contexte international encore incertain, ce geste vise à soutenir la conjoncture, tout en limitant l’appréciation du franc suisse, source de pression sur les exportations. Dans ses commentaires, la BNS a toutefois surpris économistes et investisseurs en laissant entendre qu’elle ne prévoit, a priori, pas de nouvelle baisse de taux dans les prochains mois. Si l’institut d’émission semble, pour l’heure, écarter un retour généralisé aux taux négatifs, certains dépôts font néanmoins déjà l’objet d’une pénalité : au-delà d’un certain seuil, les réserves des banques commerciales déposées auprès de la BNS seront désormais frappées d’un taux négatif de -0,25 %. Selon nous, de nouvelles baisses de taux en territoire négatif restent possibles, notamment en cas de choc conjoncturel provoqué par des incertitudes géopolitiques ou par l’instauration de droits de douane pénalisants sur les exportations vers les États-Unis.
Pourquoi le prix du pétrole inquiète-t-il tant les marchés européens ?
Après plusieurs mois dominés par les préoccupations liées à la guerre commerciale, les tensions géopolitiques ont refait surface au Moyen-Orient, notamment avec une série d’attaques entre Israël et l’Iran et une intervention surprise des Etats-Unis. Dans ce contexte, le prix du pétrole Brent a grimpé à 75 dollars le baril, en hausse de 20 % depuis début juin.
Ce regain de tension pèse sur les marchés européens, qui peinent à maintenir leur dynamique positive après un bon début d’année. L’Europe, dont environ 40 % de la consommation énergétique repose sur le pétrole — en grande partie importé —, reste particulièrement exposée à l’évolution de son prix. Une escalade du conflit entre Israël et l’Iran pourrait perturber les livraisons en provenance du Moyen-Orient, entraînant une nouvelle flambée des cours.
Un tel scénario viendrait clairement freiner les premiers signes de redressement économique, alors même que les baisses de taux de la BCE commencent à produire leurs effets et que l’Allemagne s’apprête à lancer un plan de relance. La reprise reste en effet fragile : une hausse durable des coûts énergétiques pourrait rapidement peser sur la consommation des ménages et raviver de mauvais souvenirs.
Pour l’heure, tant que les tensions géopolitiques ne s’aggravent pas et que le prix du pétrole reste stable, la situation paraît gérable. Il convient également de noter que l’euro s’est renforcé face au dollar : exprimé en euros, le prix du pétrole a reculé d’environ 15 % sur un an, limitant ainsi l’impact pour les consommateurs européens — un facteur qui pourrait même jouer un rôle de soutien si les incertitudes venaient à se dissiper.
À court terme, l’instabilité géopolitique devrait continuer à peser sur le sentiment des marchés européens. Les négociations commerciales entre l’Union européenne et les États-Unis s’annoncent par ailleurs plus longues et plus complexes que celles menées avec le Royaume-Uni, ajoutant une dose d’incertitude supplémentaire. Mais pour les investisseurs capables de regarder au-delà de ces turbulences temporaires, les fondamentaux économiques du continent apparaissent solides à moyen terme — une première depuis de nombreuses années — ce qui pourrait donner une impulsion positive aux marchés européens dans les mois à venir.
Chiffre de la semaine : 2
La Réserve fédérale américaine a réitéré la semaine passée son intention de couper par deux fois ses taux directeurs d’ici la fin de l’année. Pour le moment, Jérôme Powell et ses collègues prennent le temps de mieux mesurer les potentiels impacts de la politique tarifaire de Donald Trump sur l’économie et notamment l’inflation aux Etats-Unis.
Auteur
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Christina Carlsten est analyste et gérante senior sur les marchés européens auprès de Piguet Galland depuis 1997. Elle a commencé sa carrière à la Banque Scandinave en Suisse à la clientèle privée pour ensuite se tourner vers l’analyse financière et la gestion de fonds. Au sein de la Banque, elle est en charge de la gestion de fonds et de certificats thématiques investis en actions européennes et globales. Elle est titulaire d’une licence en sciences économiques de l’Université de Lund (Suède).